La Voix du Nord : « Moi je » ou la difficile mise en place du conseil de quartier Nord à Roubaix »
Bel article signé par Wilfried Hecquet dans la Voix de ce lundi 23 novembre. Ca rappelle évidemment celui de Brigitte Lemery de l'an passé, sur la crainte d'instrumentalisation des habitants tirés au sort pour les conseils consultatifs nouvelle génération... mais on était quand même loin d'imaginer que ça générerait l'expression de relents xénophobes contre les plus pauvres et d'intolérance à la Culture, à Roubaix.
"Pas de ça chez nous" comme leitmotiv NIMBY pour négocier la ville, ça va pas être simple !
ACTUALITÉ ROUBAIX
« Moi, je… », ou la difficile mise en place du conseil de quartier Nord à Roubaix
lundi 23.11.2009, 05:03 – La Voix du Nord
Légende photo : Fabrice Belin, élu en charge de la démocratie participative, est souvent pris pour cible.
Le nouveau conseil de quartier Nord était réuni en séance plénière, vendredi. Il y a été question de la mise en place des commissions, et de deux sujets qui divisent déjà les conseillers : l’arrivée de l’oeuvre de Wim Delvoye (et plus largement la place accordée à la culture) ; et l’installation de cinq bungalows pour des familles Roms.
PAR WILFRIED HECQUET
Autant le dire tout de suite : il y a des jours où l’on n’aimerait pas s’appeler Fabrice Belin. L’élu roubaisien en charge, notamment, de la démocratie participative, a décidément fort à faire avec le dossier des conseils de quartier. Décriés avant même leur lancement, ils commencent désormais à oeuvrer. Mais si la démocratie participative, ça peut paraître très facile sur le papier, cela est une autre paire de manches dans la réalité. Chacun voit bien souvent midi à sa porte, et même la simple mise en place d’un débat constructif fait parfois figure de montagne infranchissable. La somme d’intérêts individuels ne sert jamais mécaniquement l’intérêt commun.
Wim Delvoye.
On vous a déjà parlé à plusieurs reprises de l’arrivée prévue d’une sculpture de l’artiste Wim Delvoye, face à la résidence Latine (le long de l’avenue des Nations-Unies). Le projet, porté par le comité de quartier de l’Hommelet et sur lequel travaille une commission de travail des conseils de quartier, est loin de faire l’unanimité. Dès l’évocation du projet, Mme Duquesne (CNL Latine) monte sur ses ergots : elle s’oppose fermement au lieu d’implantation de cette oeuvre d’art, arguant notamment que « la résidence Latine, c’est l’Alma ». On dirait plutôt la Fosse aux Chênes. Mais en tout cas, pour elle, ce n’est pas l’Hommelet. « Je n’aime pas trop ces réunions où on oppose les uns aux autres, interviendra Fabrice Belin, tentant de calmer les esprits. Il faut dépasser ça et construire. » Difficile pour lui de se faire entendre, cela repart de plus belle avec cette habitante : « C’est bien beau, on met en place une statue, mais dans mon quartier on ne fait rien du tout pour moi ! » Et d’évoquer des soucis visiblement personnels, réclamant une solution immédiate tout en invectivant Fabrice Belin. L’élu devra à nouveau apaiser les tensions : « Madame, ne me faites pas de procès d’intention. » Il sera aidé par une membre du conseil de quartier : « Il faut laisser le temps de mettre les choses en place, on ne peut pas construire la Tour Eiffel en un jour ! » Mais cet autre habitant n’a semble-t-il pas reçu le message. Il enchaîne sur le problème d’une place située « à côté de chez moi, qui est devenue un véritable dépotoir et personne ne fait rien ». Nouvelle intervention de Fabrice Belin : « Le conseil de quartier n’est pas une instance municipale. S’il vous plaît, laissez les choses démarrer… » Et Wim Delvoye là-dedans ? Eh bien, justement, un membre du conseil de quartier trouve ça un peu gros : « Aller à Londres pour voir un atelier, faire du voyage, en quoi cela est-il une expertise ? », faisant référence au travail du comité de quartier de l’Hommelet en lien avec l’artiste.
Un autre n’est pas d’accord, et trouve que le conseil de quartier est là aussi pour « mettre en avant la culture ». Bruno Lestienne, du comité de quartier de l’Hommelet, tente d’expliquer que l’oeuvre est un prétexte pour « sensibiliser les habitants du quartier à l’art contemporain ». Avec un travail de fond engagé pour que les riverains s’approprient cette oeuvre. Le directeur de l’association Art Connexion, impliqué dans ce projet, enchérit : « La culture, l’art, ça a une autre fonction que purement décorative. mais pour le comprendre, il faut des clés. Cet artiste est venu dans le quartier, rencontrer des gens. Et lorsqu’on est allé à Londres, c’était pour voir des oeuvres d’art fortes, commentées par des experts, pour justement avoir les clés pour comprendre. » Un membre du conseil de quartier n’est pas convaincu : « Il doit y avoir d’autres financements pour le culturel, il ne faut pas utiliser le fond d’expertise du conseil de quartier. » Car voilà justement la question cruciale : le conseil de quartier va-t-il donner son accord à la mobilisation d’un fond d’expertise pour faire avance le projet ? Ce sera finalement non, par onze votes contre et huit pour.
Roms.
Un autre sujet a en revanche obtenu une majorité de votes pour, et le fond d’expertise sera donc mobilisé en ce qui concerne la future installation de cinq bungalows pour des familles Roms entre les rues d’Alger et de Mascara. L’on sait que bon nombre d’habitants sont farouchement opposés à cette arrivée de nouveaux voisins. On sait aussi que la municipalité va faire débuter prochainement, quoi qu’il arrive, les travaux. Mais l’idée est ici de permettre aux habitants, via le conseil de quartier, d’avoir un avis juridique pour examiner tous les moyens de s’opposer à cette implantation.
Vendredi, des habitants et des élus d’opposition présents ont aussi rappelé à quel point ils regrettaient « le manque de concertation » sur ce dossier. On n’a pas fini d’en parler. •
Laisser un commentaire à propos de l'article