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Quand Rachid TAHA enchantait l’Hommelet (et tout Roubaix, à l’Hestival). RIP.

Le chanteur Rachid TAHA vient de nous quitter d’une crise cardiaque, à l’age de 59 ans. Dans les années 90, il avait été programmé dans le cadre de l’Hestival, un festival monté par des habitants du quartier de l’Hommelet, à Roubaix.

Voici la bande annonce de l’époque qui passait sur MCM. On en était fiers.

C’était l’époque de la sortie de 1,2,3 Soleil et de Ya Rayah. Nous étions allé le voir au Grand Mix où il échangeait avec des jeunes, ce qu’il adorait faire. C’était un gars engagé. La Douce France revisitée, c’était lui et son groupe Carte de Séjour. Toute une époque.

Donc, on lui avait proposé de venir à Roubaix. Il nous avait fait un super prix, sachant que plusieurs musiciens l’accompagnaient sur scène. Sinon, nous n’aurions sans doute pas pu (les concerts étaient gratuits, en plein air, ça avait joué, mais n’empêche : alors qu’il était en plein succès, il n’avait pas rechigné à faire un geste fort).

Ce jour-là, le 15 aout 1994, le groupe a commencé à chanter à la tombée de la nuit. De peu de gens, la friche Phildar s’était ensuite incroyablement remplie : imaginez le parc du Nouveau Monde, jardin compris, avec des gens presque collés les uns aux autres, d’un bout à l’autre, plus les rues remplies. Quatre hectares de gens chantant et dansant. Jeunes, vieux, familles, gens du quartier, d’autres venus en bus de Marseille : une fête à Roubaix comme on n’en avait jamais vue !

Rachid TAHA était venu, plus tôt, très décontracté avec sa troupe d’une dizaine de musiciens. Je me souviens qu’une maman du quartier avait amené des gâteaux faits maison. Il l’avait faite entrer dans les coulisses très simplement. Un souvenir sans doute à jamais gravé dans l’histoire de cette famille. Ou un fan anonyme, venu faire dédicacer ses albums, de loin. Là aussi, accueilli sans faire de manière. La classe.

Ce jour-là il y avait aussi Dee Nasty, la légende, lui aussi d’une simplicité incroyable, et le lendemain on attendait Arsenik, en pleine gloire, qui boxaient avec les mots. Bref, rien à voir avec ces vedettes éphémères… Une sorte d’age d’or du hip hop, voire des musiques urbaines, en somme. Je ne sais plus qui était programmé avant l’autre, mais ça avait été un jour incroyable. Des milliers de gens, heureux, paisibles, ensemble, sous une douce chaleur d’une nuit d’été. Des bénévoles, jeunes du quartier mais pas que, épuisés qui, d’un jour à l’autre, dormaient sur place tellement ils n’en pouvaient plus. Certains dormaient assis — pour dire ! Et c’était toujours avec plaisir. Motivés. Mobilisés.
On se croise encore parfois. On évoque ce bon temps, pas sur que ça revienne un jour aussi intensément (ils le racontent à leur enfant — mais il faut l’avoir vécu de l’intérieur pour comprendre ce que c’était vraiment). Et le calicot HESTIVAL en grande lettre (avec un H comme Hommelet) et un logo en forme de soleil. Un. Deux. Trois… C’était la meilleure édition des 5, l’avant-dernière. Un Woodstock à la roubaisienne (Ce site)

J’avais eu l’occasion de revoir le chanteur à Montréal, au Métropolis, quelques années plus tard. En allant acheter mon ticket, sur Sainte Catherine, un de ses musiciens m’avait reconnu — à ma grande surprise. « Ah ! Roubaix… ! « , avait-il dit. En signifiant que cette date avait été marquante dans leur tournée de cet été-là. Mais certainement pas autant qu’elle l’avait été — et le restera — pour nous. Et son Voila Voila reste malheureusement toujours d’une inquiétante actualité, du moins en Europe. Repose en paix, l’ami.

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